Ecrire sur l’Algérie me paraît
important, mais sûrement pas dans une
perspective de nostalgie stérile.
Cela répond plutôt à un besoin impérieux de me
situer par rapport à ce pays courageux qui, entraîné dans la vaste et générale
secousse de décolonisation, a fini par
arracher, on sait à quel prix de part et d’autre, son indépendance sans être, hélas
épargné pour autant par de nouveaux écueils.
Comment expliquer que ces communautés
d’Algérie, autres que celles des indigènes musulmans, se soient soustraites spontanément à ces
processus de réorganisation politique, puisque sans l’ombre d’un doute sur le
bien fondé et l’urgence de leur départ, elles ont rejoint la France, fortes de
leur condition de citoyens français, acquise près d’un siècle plus tôt ?
De même que les descendants de colons français, ou
méditerranéens, surnommés « pieds-noirs », se sont sentis contraints
d’abandonner rapidement leur pays, je pense à l’exode massif de l’été 1962
auquel, par coïncidence, je me suis
trouvée mêlée dans un train bondé qui partant de Marseille amenait à Paris une
foule de rapatriés d’Algérie), nous, français de souche algérienne, n’avons pas
davantage envisagé, à de très rares exceptions près, de rester au pays. Conscients
des difficultés inéluctables qui se profilaient à l’horizon,traumatisés par les
violences d’évènements qu’il a bien fallu nommer « guerre », nous trouvions
opportun de rejoindre la chère France de nos livres d’école ..
Quoi qu’il en soit de l’épopée
« Pied-noir », je n’en fais pas partie, ayant par libre arbitre
quitté Alger en 1952. Ma famille, loin de s’être implantée en Afrique du
Nord autour des années 1830 était déjà
présente à l’arrivée des français depuis des temps éloignés, sans doute,
L’Algérie est donc notre terre ancestrale, nous y avons laissé les maisons, les tombes, les vestiges de nos
ancêtres. Son abandon sans retour peut ainsi apparaître comme une troublante et
délibérée rupture de la longue chaîne des générations. Rupture qu’il faut bien reconnaître comme
telle pour aider nos enfants à se situer dans cette discontinuité peu rassurante.
Au nom de quels romantiques prétextes
déciderait-on de ne plus y faire allusion, et même de n’y plus retourner, de ne
pas superposer aux souvenirs idéalisés les images contemporaines d’une Algérie
en mutation ?
Peut-être est-il encore opportun d’y
conduire les nôtres et de leur rappeler, sans inutile accent
pathétique : « Voici les lieux où une longue lignée de vos
ascendants a vécu, y compris vos grands-parents maternels et votre
mère. » Faut-il attendre que
les tensions se dissipent pour accomplir ce nécessaire pèlerinage aux
sources ?
A l’arrivée, nous n’avons plus la même patrie
que nos frères d’outre -mer,
mais
nous conservons une terre natale commune : l’Algérie.
Paris Février 2001
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire